L’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dehok – Nouhadra
L’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok – Nouhadra se situe à 36°51’42.1″N 42°59’45.1″Eet 536 mètres d’altitude.
L’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra est ancienne. Elle mentionnée dans des manuscrits du XVIesiècle. Fondée par l’Église Apostolique Assyrienne de l’Orient, elle passa ensuite à l’Église chaldéenne à une date inconnue. Devenue chaldéenne, l’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra fut le siège d’une activité religieuse et intellectuelle que révéla l’existence en son sein d’une bibliothèque. Ancienne cathédrale chaldéenne, l’église de l’Assomption de la Vierge Marie Marie est encore employée pour des célébrations annuelles et occasionnelles. L’édifice échappe ainsi à la prédation et la destruction.
Le très respecté Monseigneur Francis ALICHORAN (1928 – 1987) est enterré dans l’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra. Il fut l’auteur de nombreuses publications, parmi lesquelles des récits historiques, poétiques et liturgiques en français et en araméen (syriaque) et soureth (néo-syriaque).
L’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra
Août 2017 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Localisation
L’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra[1]se situe à 36°51’42.1″N 42°59’45.1″Eet 536 mètres d’altitude. L’églisese trouve dans la ville de Dohok-Nouhadra, au cœur de la région autonome dite du Kurdistan d’Irak. Chef lieu de la province éponyme, Dohok-Nouhadrajouit d’une situation géographique privilégiée, à 75 km au nord de Mossoul et 155 km au nord-ouest d’Erbil, la capitale régionale kurde.
Adossée au massif montagneux qui borde la partie septentrionale du Kurdistan d’Irak, ouverte sur la plaine qui longe la rive orientale du Tigre, Dohok-Nouhadraest à la croisée des chemins et des influences.
[1]Nouhadra (Nohadra) est le nom syriaque de la ville de Dohok (Dehok, Dohuk).
Toponymie
Comme souvent en Mésopotamie, Dohok-Nouhadraporte dans l’histoire de sa toponymie la variété des cultures et des civilisations qui s’y sont succédées. Les Kurdophones préfèreront Duhok, les Arabophones choisiront Dahuk, tandis que les Syriaques voudront préserver Nouhadra.
Le village put également s’appeler (sans certitude) Dastagard au IVesiècle à l’époque du roi de Perse Shapur II et du martyr Mar Ith-Alaha[1].
[1]Voir à ce propos « Assyrie chrétienne »,vol.II. , Jean-Maurice Fiey, o.p., Imprimerie catholique, Beyrouth, p.682
Fragments d’histoire chrétienne
La première étape de l’évangélisation de la Mésopotamie, dès le Iersiècle, est liée aux missions des apôtres Thaddée (Addaï) et Barthélémy, mais aussi et surtout à l’apôtre Thomas avec ses disciples et compagnons. La tradition rapporte que Thomas passa non seulement par Mossoul où fut établie une église primitive à son nom, puis « se serait arrêté à Séleucie-Ctésiphon au cours de son voyage vers l’Inde[1]»où fut fondée et structurée l’Église Apostolique Assyrienne de l’Orient (Église de l’Orient).
Au IVesiècle, le martyre de Mar Ith-Alaha vers l’an 379 [voir notice sur l’église chaldéenne Mar-Ith Atahah]témoigne d’une très ancienne présence chrétienne à Dohok-Nouhadra. Les manuscrits syriaques attestent également l’existence d’une église et d’un monastère avant le IVesiècle.
Jusqu’au déclin de l’Empire Ottoman, la population de Dohok-Nouhadraétait majoritairement chrétienne. Les razzias kurdes à la fin du XIXesiècle, le génocide des Arméniens etAssyro-Chaldéens (1915-1918) puis le massacre de Semmel en 1933 entrainèrent des modifications profondes et radicales des équilibres démographiques et confessionnels locaux et régionaux.
Aujourd’hui, la population de Dohok-Nouhadraest essentiellement kurde, musulmane sunnite. Les Chrétiens qui y demeurent sont majoritairement membres de l’Église (catholique) chaldéenne. L’Église de l’Orient, qui fut mille ans durant le terreau confessionnel dominant de l’Assyrie chrétienne,parvintàypréserver son empreinte historique à Dohok. Lepassage de l’Église de l’Orient vers l’Église Chaldéenne ne s’est pas fait immédiatement après la scission de 1553. En 1676, le missionnaire dominicain Ballyet qui visita Dohok ne compta que 30 familles catholiques et une seule église, probablement celle de l’Assomption de la Vierge Marie[2]. C’est à la fin du XVIIIe siècle et au cours du XIXe siècle que l’Église chaldéenne prit l’essor qu’on lui connait aujourd’hui. En 1913, l’abbé Joseph Tfinkdji recensait 350 Chaldéens à Dohok, 2 prêtres, 1 église et 1 école[3]. Vers 1965, le dominicain Jean-Maurice Fiey y dénombra 2220 Chrétiens pour 9000 habitants[4].
Signalons également à Dohok-Nouhadral’existence d’une micro-communauté chrétienne, arménienne, non autochtone, dont la fragilité démographique est comme pour l’Église de l’Orient, inversement proportionnelle à son enracinement dans l’histoire.
[1]In Histoire de l’Église de l’Orient, Raymond le Coz, Éditions du Cerf, 1995, p.21
[2]The ecclesiastical organisation of the church of the East, 1318-1913,David Wilmshurst, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, Vol. 582, Subsidia Tomus 104 LOVANII IN AEDIBUS PEETERS, 2000, p.140
[3]L’Église Chaldéenne Catholique, autrefois et aujourd’hui, Abbé Joseph Tfinkdji, Extrait de l’annuaire pontifical catholique de 1914, p.72
[4]In « Assyrie chrétienne »,vol.II. , Jean-Maurice Fiey, o.p., Imprimerie catholique, Beyrouth, p.681
Les églises anciennes de Dohok-Nouhadra
Plusieurs églises anciennes méritent d’être citées à Dohok-Nouhadra :
L’église primitive puis le couvent de Mar Ith-Alahah (voir notice) édifiés à son nom après son martyre (entre fin IVeet VIIesiècles). L’actuelle église Mar Ith-Alahah pourrait avoir été édifiée, mais sans certitude, sur le site de l’église ou du couvent primitifs.
L’église Mar Guorguis, citée pour avoir probablement accueilli un évangéliaire de 1599 offert par le prêtre Auraha (Abraham). Mar Guorguis devint la mosquée de Dohok[1].
L’église de l’Assomption de la Vierge Marie que la littérature syriaque connait dès le XVIe– XVIIesiècle.
[1]In « Assyrie chrétienne »,vol.II. , Jean-Maurice Fiey, o.p., Imprimerie catholique, Beyrouth, p.682
Histoire et actualité de l’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra
L’église de l’Assomption de la Vierge Marie est mentionnée dans des manuscrits du XVIesiècle[1]. Elle est aussi attestée en 1635, date à laquelle elle apparaît étrangement sous la juridiction de l’Église Syriaque-Orthodoxe, bien que sa fondation soit sans aucun doute attribuée à l’Église Apostolique Assyrienne de l’Orient. Redevenue assyrienne l’église passa ensuite à l’Église chaldéenne à une date inconnue.
Devenue chaldéenne, l’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra fut le siège d’une activité religieuse et intellectuelle que révéla l’existence en son sein d’une bibliothèque pour laquelle fut notamment écrit en 1741 « un Liber Magnetis de Joseph II[2] »[3].L’église devint même propriétaire d’un héxaméron[4]de 1701 qui se trouverait aujourd’hui dans une bibliothèque britannique[5]. Pourtant, « sur les quelques cinquante volumes manuscrits formant la bibliothèque de Dehōk, entreposée à l’église de la Vierge, très peu de ceux qui ont gardé leurs colophons portent le nom même de Dehōk[6] ».
En 1850, il semble que lors de la reconstruction de la nouvelle église de l’Assomption de la Vierge Marie, son architecture ancienne ait été révélée.
En 1948, l’église fut restaurée et même élargie. C’est ce qu’atteste une inscription syriaque de 10 lignes visible sur le mur externe du bas-côté droit de l’église. On peut y lire que cette restauration eût lieu au temps de Mar Joseph VII Ghanima, patriarche chaldéen et de Mar Yōhannan Nīsān, métropolite et évêque du diocèse de Zakho et Nouhadra[7]. Le curé de l’église se nommait alors Yousif Bahro.
Une autre inscription syriaque signale une rénovation de l’église en 1972[8]. En 1977 le père Augustin Sadeq restaura les murs et le plafond de l’église.
Ancienne cathédrale chaldéenne, l’église de l’Assomption de la Vierge Marie Marie est encore employée pour des célébrations annuelles et occasionnelles. L’édifice échappe ainsi à la prédation et à la destruction.
[1]In « Recueil des inscriptions syriaques », Tome 2, Amir Harrak, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, 2010, p.534
[3]In « Assyrie chrétienne »,vol.II. , Jean-Maurice Fiey, o.p., Imprimerie catholique, Beyrouth, p.683
[4]Un héxaméron est un récit (traité) relatif aux six jours de la Création du Monde selon la Genèse
[5]Est-ce à Cambridge comme l’écrit Jean-Maurice Fiey, o.p, in « Assyrie chrétienne »,p.683 ou bien la British Library comme l’écrit Amir Harrak, in « « Recueil des inscriptions syriaques », p.534 ?
[6]In « Assyrie chrétienne »,vol.II. , Jean-Maurice Fiey, o.p., Imprimerie catholique, Beyrouth, p.683
[7]In « Recueil des inscriptions syriaques », Tome 2, Amir Harrak, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, 2010, p.534-535
[8]In « Recueil des inscriptions syriaques », Tome 2, Amir Harrak, Académie des Inscriptions et Belles Lettres, 2010, p.535
Hommage à Monseigneur Francis Alichoran
Monseigneur Francis ALICHORAN (1928 – 1987) est enterré dans l’église de l’Assomption de Dohok-Nouhadra. Chorévêque et vicaire patriarcal chaldéen en France, recteur de la Mission Chaldéenne catholique de Paris (1973-1987), il fut auparavant le curé de Dohok-Nouhadra (1954 -1973). Décédé le 1erjuillet 1987, ses obsèques furent célébrées à la cathédrale Notre Dame de Paris le 3 juillet 1987. Son cercueil fut ensuite transporté en Irak, en l’église de l’Assomption de Dohok-Nouhadra, où ses funérailles furent célébrées le 5 juillet 1987, en présence du jeune père Rabban al Qas, actuel évêque d’Amadia, et du jeune père Sako, actuel patriarche chaldéen[1]. Une foule nombreuse vint rendre hommage à ce prêtre et évêque très respecté.
Né en 1928 à Harbol, dans le sud-est de la Turquie, ordonné prêtre le 15 mai 1954, après avoir étudié au séminaire syro-chaldéen de Mossoul, Monseigneur Francis Alichoran est l’auteur de nombreuses publications, parmi lesquelles des récits historiques et poétiques en français et en araméen (syriaque) et soureth (néo-syriaque). Il traduisit aussi en français le texte en araméen des Évangiles, appelé La Pshytta. Il rédigea également en français et en araméen un Missel chaldéen. Publié en 1982, il est utilisé de nos jours dans toutes les églises assyro-chaldéennes de France.
[1]Voir l’hommage rendu à Monseigneur Françis Alichoran, grâce à ce reportage vidéo réalisé par son neveu, l’historien Joseph Alichoran. On peut y voir dans une première partie les funérailles à la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 3 juillet 1987, puis l’enterrement le 5 juillet 1987 en l’église de l’Assomption de la Vierge Marie à Dohok-Nouhadra : https://www.youtube.com/watch?v=D6IV5dR_RqI
Description de l’église chaldéenne de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra
L’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra est en quelque sorte noyée dans un ensemble urbain, à proximité d’un pont, entre un parking automobile, un grand immeuble en surplomb et une large route au dessus.
Pour accéder à l’église, il faut emprunter une petite traboule entre une maison délabrée et l’église proprement dite. Une plaque trilingue (arabe, syriaque, anglais) portant mention de la restauration de 1850 signale son emplacement.
Après avoir ouvert un portail métallique, on se trouve dans une cour intérieure autour de laquelle sont disposés les bâtiments de l’ancien évêché. Les lieux sont visiblement encore habités (ou fréquentés) par une famille. Dans l’axe et à droite du portail, on découvre sur deux niveaux les anciens bureaux et logements, ainsi qu’un autel de prière consacré à la Sainte Vierge et aménagé sous l’escalier. À gauche, se trouve l’église de l’Assomption de la Vierge Marie.
L’église est surélevée d’un bon mètre par rapport au niveau de la cour. On y pénètre par deux portes latérales. La première, à l’arrière du bas-côté droit. La seconde, à l’avant de ce même bas-côté.
À l’intérieur, l’église présente une architecture basilicale et longitudinale, à trois nefs. La nef centrale et les bas-côtés sont séparés par deux paires de piliers octogonaux. La voûte centrale est en arc très légèrement brisé, tandis que les voûtes des bas-côtés sont en arc plein cintre.
Une haute tribune, construite plus tardivement au fond de l’église, en occupe toute la largeur.
Dans l’axe de la tribune, le sanctuaire apparaît au-delà d’une porte royale à arcs outrepassés. La grande porte royale, au centre, est surmontée d’une niche apparemment vide. Les deux portes des bas-côtés sont plus petites. Au centre du sanctuaire, derrière le maître-autel, le mur de l’abside comporte une grande arche en pierre sculptée, ornée de frises géométriques. Les bas-côtés du sanctuaire sont équipés d’autels collatéraux, visiblement ajoutés au cours des rénovations postérieures à la reconstruction de 1850, derrière lesquels sont aménagés deux espaces à usage liturgique.
Sur le mur du bas-côté droit on découvre trois stèles funéraires. L’une d’elles est celle Monseigneur Francis Alichoran. Curieusement, son portrait photographique encadré ne tient plus dans son logement initial et se retrouve malencontreusement plaqué sur les inscriptions syriaques.
L’église de l’Assomption de la Vierge Marie de Dohok-Nouhadra mériterait une sérieuse rénovation. Les murs et la voûte sont rongés par l’humidité. Les enduits et le mortier se désagrègent progressivement.
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