L’ancienne cathédrale chaldéenne Om Al Ahzane de la Citadelle de Kirkouk (et autres anciens édifices chrétiens de la citadelle)

L’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk se situe à 35°28’14.44″N 44°23’45.86″E et 364 mètres d’altitude sur le tell où se dresse la citadelle.

 

L’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk fut construite dans la seconde moitié du XIXe siècle et consacrée en 1862 au nom de la Mère des Douleurs (ou Notre-Dame des Sept Douleurs).

Elle permit de relocaliser sur ce vaste tell la vie chrétienne locale, alors que la majorité des chaldéens était encore implantée à Koria, à 2 km de la citadelle.

Cette belle cathédrale aujourd’hui en ruines s’effondra pour plusieurs raisons. Elle souffrait non seulement de l’humidité et des très fortes variations climatiques, mais aussi de la charge d’une voûte trop lourde sur des piliers fragiles, de la structure des murs en pierres de tout venant tenues par un mortier précaire, et enfin de l’inadaptation du ciment et du béton pour le sauvetage de l’édifice en 1961.

Le site est encore visité de nos jours, alors que sa dislocation se poursuit. Il n’existe apparemment pas de projet de restauration ou plus simplement de valorisation patrimoniale de cet édifice.


Photo : L’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk. Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Localisation

L’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk se situe à 35°28’14.44″N 44°23’45.86″E et 364 mètres d’altitude sur le tell où se dresse la citadelle.

Kirkouk, capitale provinciale du même nom, se situe à l’est du Petit Zab. La ville est traversée par la rivière khasa, un affluent saisonnier du Tigre, sur son versant oriental. Au nord-est de l’Irak, la région où se situe l’actuelle Kirkouk est connue dans l’histoire ancienne sous le nom de Bét Garmaï, autrefois peuplée de Garaméens, peut-être issus d’une « peuplade persane montée dans cette région avant l’islam[1]», mais aussi peut-être Ninivites et Chaldéens et qui parlaient « certainement araméen[2] ».

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[1] In Assyrie Chrétienne,  vol.III, p. 15, Jean-Maurice Fiey, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1968.

[2] Id. p.16

La ville de Kirkouk vue depuis la citadelle où se trouve l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Démographie et géopolitique

Les Kurdes constituent à Kirkouk la très grande majorité d’une population supérieure à 1,2 millions d’habitants. Le reste de la population est composée de Turcomans (chiites et sunnites), d’Arabes (sunnites) et de Chrétiens (essentiellement chaldéens et très faiblement arméniens). On comptait également autrefois une communauté juive aujourd’hui disparue. Il y aurait en 2018, 5000 chrétiens chaldéens à Kirkouk pour 7000 dans l’ensemble du territoire diocésain[1].

En 1838, on ne comptait à Kirkouk que 300 Chaldéens pour 15000 habitants. Fin XIXe, les Chaldéens étaient 800 pour 30000 habitants[2]. Cette présence chrétienne chaldéenne, certes modeste, était en pourcentage cinq plus importante qu’elle ne l’est en 2018.

Grand centre pétrolier du nord de l’Irak, les rivalités communautaires se sont intensifiées à Kirkouk au tournant des XXe et XXIe siècles et ont été exacerbées par la guerre du Golfe dans les années 90 et par la chute du régime de Saddam Hussein en 2003. Revendiquée par Massoud Barzani, ancien président de la Région autonome du Kurdistan d’Irak, Kirkouk fut protégée par les peshmergas kurdes lorsqu’en juin 2014 daesh menaça de s’en emparer.

Le référendum d’autodétermination du Kurdistan d’Irak, le 25 septembre 2017, inclut la province de Kirkouk, mais se solda le 16 octobre par une reprise de contrôle militaire et politique de Kirkouk par les forces armées irakiennes et des unités paramilitaires apparentées.

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[1] Source : Mgr Yousif Thomas Mirkis, archevêque de Kirkouk.

[2] Source Michel Chevalier, in « Les Montagnards Chrétiens du Hakkari et du Kurdistan septentrional », Université Paris-Sorbonne, 1985, cité par Mgr Yousif Thomas Mirkis, archevêque de Kirkouk, dans une note personnelle.

L’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk et les anciens bâtiments de l'archevêché.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Panneau en syriaque, anglais et arabe signalant les ruines de la cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue d'ensemble des ruines de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Fragments d’histoire chrétienne du Bét Garmaï et de Kirkouk (idem C151 + ajouts en bleu)

Le christianisme apparut probablement très tôt dans le Bét Garmaï, dans la foulée de l’évangélisation de la Mésopotamie par l’apôtre Saint Thomas et par ses disciples Addaï et Mari. La tradition rapporte que le premier évêque connu à Kirkouk se nommait Théocrite[1]. Vraisemblablement issu du monde gréco-romain, il put ainsi trouver refuge en Perse et exerça à Kirkouk, son apostolat au tout début du IIe siècle, entre 117 et 138[2].

Dans l’Histoire de Karka[3] « le plus ancien sanctuaire chrétien de la ville serait l’église édifiée sur l’emplacement de la maison de Joseph, le premier converti de Mār Māri[4] ». Ce sanctuaire, dont on a perdu toute trace, n’était pas situé à la citadelle de Kirkouk, mais à 2 kilomètres de là, à Koria, aujourd’hui un quartier de la métropole.

L’histoire chrétienne de Kirkouk est marquée au fer rouge par les persécutions du roi sassanide Yazdegerd II, en l’an 445, qui firent « non seulement 12000 morts, mais [aussi] toute sa hiérarchie[5] ». En guerre contre l’Empire romain d’Orient passé au christianisme, le roi perse considéra les Chrétiens comme des ennemis de l’intérieur et intensifia simultanément l’imposition du zoroastrisme dans son Empire. 6 ans après avoir martyrisé les Chrétiens de Kirkouk, il engagea ses troupes contre les Arméniens qu’il battit dans la plaine d’Avarayr. Dans ce cas comme dans le précédent, Yazdegerd II ne parvint pas à éliminer le christianisme de l’Empire perse, mais développa au contraire le culte des martyrs qui constitue encore de nos jours un ferment essentiel du christianisme mésopotamien.

L’église et le cimetière de Tahmazgerd, à Kirkouk, portent encore de nos jours  le témoignage des persécutions commises par Yazdegerd II. Après la mort du roi perse, les Chrétiens de Kirkouk érigèrent en effet vers l’an 470 un grand martyrion et instituèrent une célébration commémorative afin de « perpétuer le souvenir du triomphe des victimes[6] ».  Le site de Tahmazgerd, situé sur une colline à l’est de la citadelle, est de fait aujourd’hui le plus ancien site chrétien visible de Kirkouk (è notice correspondante). Chaque année, le 25 septembre les Chrétiens de Kirkouk font mémoire des martyrs de Tahmazgerd.

Les Chrétiens monophysites (syriaques) du Bét Garmaï eurent ensuite à lutter contre l’intolérance du métropolite nestorien de Nisibe (Nusaybin), Barsaume, à la fin du Ve siècle, vers 484/485. Ceux qui refusèrent de passer au nestorianisme, résistèrent, périrent ou furent contraints de fuir. Au long des siècles et quelles qu’aient été les crises, le nestorianisme demeura primordial dans le Bét Garmaï jusqu’à la constitution de l’église chaldéenne, issue de l’église nestorienne mais unie à Rome en 1553, dont on dit qu’elle rencontra très tôt l’adhésion des Chrétiens de Kirkouk, même s’il fallut attendre le XVIIIe siècle pour voir émerger une véritable église chaldéenne locale.

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[1] Nom d’origine grecque, Théocrite / Theocritos / Tocriti  signifie « La force de Dieu »

[2] Source : Mgr Yousif Thomas Mirkis, archevêque de Kirkouk.

[3] Karka est l’ancien nom syriaque de l’actuelle Kirkouk

[4] In Assyrie Chrétienne,  vol.III, p. 49, Jean-Maurice Fiey, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1968

[5] In Assyrie Chrétienne,  vol.III, p. 17, Jean-Maurice Fiey, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1968.

[6] Id.

Vue nord-ouest des ruines de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue nord des ruines de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Histoire de l’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk

L’ancienne cathédrale Om al Ahzane (Mère des Douleurs) de Kirkouk a été bâtie à l’emplacement de la citadelle de Kirkouk qui domine la ville.

Elle fut édifiée à l’emplacement d’une église préexistante au cours de la seconde moitié du XIXe siècle par Mgr Yohanna Tamrés (1854-1881), à l’époque du grand patriarche chaldéen Youssef VI Audo (1790-1878).

Consacrée en 1862 au nom de la Mère des Douleurs (ou Notre-Dame des Sept Douleurs), cette ancienne cathédrale porte le même nom que l’ancienne église-cathédrale chaldéenne de Bagdad construite en 1843 et renouvelée en 1898 (è voir notice correspondante).

La construction de la cathédrale Om al Ahzane permit de relocaliser sur ce vaste tell dominant la ville la vie chrétienne locale, alors que la majorité des chaldéens était encore implantée à Koria, à 2 kilomètres de la citadelle.

La cathédrale Om al Ahzane fut renouvelée en 1906. Elle accueillit en 1924 les Chrétiens de Koria qui quittèrent leurs maisons et se réfugièrent à la citadelle après les troubles occasionnés par l’occupation britannique.

Abouna Sliwa Aziz Rassam, prêtre chaldéen à Kirkouk devant l'entrée ouest de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Devant l'ancienne l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane, hier (photo) et aujourd'hui (ruines).
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Dans l'ancienne l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane, hier et aujourd'hui.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Dans l'ancienne l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane, hier et aujourd'hui.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Description de l’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk

L’ancienne cathédrale Om al Ahzane de Kirkouk est aujourd’hui en ruines. Néanmoins on peut encore voir assez facilement sa structure architecturale. La cathédrale Om al Ahzane était une église de forme basilicale à trois nefs. Elle était équipée de 5 paires de piliers qui soutenaient une triple voûte. Vers l’est, la nef centrale et ses bas-côtés convergeaient vers un sanctuaire équipé de 3 autels. Le maître autel se trouvait sous un baldaquin à 4 colonnes arquées qui convergeaient vers une colombe symbole de l’Esprit Saint. À l’ouest, au dessus de l’entrée principale, se trouvait une tribune. La façade nord de l’édifice était percée de portes latérales. La porte avant était réservée aux hommes et la porte arrière aux femmes. Au sud-est de l’église, se trouvait un martyrion (t sōhdē), où furent enterrés un prêtre et cinq évêques, dont le dernier en 1956.

Autour de l’église se trouvaient des logements d’ecclésiastiques, une école, ainsi que le couvent des sœurs chaldéennes.

La cathédrale Om al Ahzane était apparemment un bel édifice avec sa stature impressionnante, ses colonnes à chapiteaux sculptés en marbre gris de Mossoul, l’encadrement des portes et fenêtres, (…). Malheureusement, elle s’effondra. Presque naturellement dit-on ! L’eau et l’humidité qui remontaient par capillarité fragilisèrent les colonnes et affectaient la stabilité de l’édifice. Des fissures et des béances apparurent et se développèrent au point qu’il devint dangereux de continuer à célébrer. En 1961, Monseigneur Raphaël Raban tenta de la consolider sans succès.

En réalité, cette belle cathédrale souffrait non seulement de l’humidité et des très fortes variations climatiques, mais aussi de la charge d’une voûte trop lourde sur des piliers fragiles, de la structure des murs en pierres de tout venant tenues par un mortier précaire, et enfin de l’inadaptation du ciment et du béton pour le sauvetage de l’édifice en 1961[1].

Les maisons alentours étaient dans le même état, contraignant les habitants du tell à descendre en ville. La citadelle se dépeupla rapidement et la cathédrale Om al Ahzane fut abandonnée. Faute d’une restauration adéquate l’édifice continua de se dégrader.

Un projet public qui visait à transformer la citadelle en parc de loisirs fut ensuite lancé mais resta inachevé. Les travaux préliminaires contribuèrent néanmoins à aggraver les destructions patrimoniales.

Il ne semble subsister d’Om al Ahzane que bien peu d’informations patrimoniales, alors qu’elle fut la grande cathédrale de l’archevêché chaldéen de Kirkouk avant que celui-ci ne soit transporté au cœur de la cité. Les documents et objets restants sont aujourd’hui réunis dans le musée de l’archevêché. Certains d’entre eux sont présentés au public : pierres gravées, vêtements et mobiliers liturgiques, …

Autrefois, la cathédrale Om al Ahzane était parfaitement adaptée aux besoins de la communauté chaldéenne. 300 à 400 personnes pouvaient s’y rassembler, soit à peu près la moitié des Chaldéens de Kirkouk lors de sa construction en 1862.

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[1] Observations constatées par l’archéologue et historienne Narmin Ali Amin et formulées au cours d’une interview vidéo enregistrée sur site de la cathédrale le 1er juin 2018.

Vue intérieure nord dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue est (en direction du chœur) dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue sud-est dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue sud-ouest dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Vue du mur sud dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Chapiteau sur pilier inscrit dans le mur sud de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Reste d'un chapiteau à terre dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Reste d'un chapiteau à terre dans l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Angle nord-ouest en cours d'effondrement de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Souvenirs d’un témoin d’Om al Ahzane.

Luis Bahjat, ingénieur à la retraite : « Chaque matin la cloche sonnait pour annoncer la messe. Ma maison était tout près de la cathédrale Om al Ahzane. J’y allais tous les jours dès 5 heures du matin avec mon père qui était sous-diacre. Pendant la messe j’étais enfant de chœur, ensuite je partais à l’école et je revenais à Om al Ahzane pour la prière du soir. En été, comme il faisait chaud, nous avions l’habitude de prier dehors devant l’autel aménagé sur le côté nord de l’église.

Aujourd’hui, je continue à venir dans cette église, trois ou quatre fois par mois. Je viens prier pour les évêques et le prêtre qui y sont enterrés. Voir cette église effondrée me rappelle mes souvenirs d’enfance. Je suis ému de la voir en ruines. J’aimerais tant qu’elle soit reconstruite,  comme elle était avant ! »

Luis Bahjat, ingénieur à la retraite et ancien enfant de chœur de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Luis Bahjat, ingénieur à la retraite et ancien enfant de chœur sous l'entrée ouest de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Photo souvenir de Luis Bahjat, ingénieur à la retraite et ancien enfant de chœur de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA
Intérieur de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane de Kirkouk, dans les années 60 et aujourd'hui.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

Autres anciens édifices chrétiens de la citadelle

L’église Maryamana. Pour le savant dominicain et archevêque de Kirkouk, Monseigneur Yousif Thomas Mirkis, la vieille mosquée Ulu Jemeh (ou Ulu Gami) de la citadelle de Kirkouk est sans doute une ancienne église[1], consacrée au nom de la Vierge Marie et construite fin VIe-début VIIe siècle, par l’évêque Yazdin, qui fut un proche du roi perse Khosro II.

Pour l’historienne du patrimoine irakienne, Narmin Ali Amin, cette ancienne église fut transformée en mosquée au XIIIe siècle.

La mosquée de Nabi Daniel. Célébré par les musulmans chiites, qui voient en lui en un prophète de l’islam, Daniel est aussi un des quatre grands prophètes de l’Ancien Testament. Déporté à Babylone avec les Juifs de Jérusalem et de Juda, au VIe siècle avant J.C. sous Nabuchodonosor II, Daniel devint conseiller à la cour du grand roi babylonien, avant de servir les nouveaux dynastes mède et perse. Tombé en disgrâce et miraculeusement sauvé par sa foi de la fosse aux lions, Daniel fut réhabilité. L’auteur du Livre de Daniel, connu pour ses visions d’apocalypse, sa sagesse et ses prophéties notamment sur la venue d’un Messie, est à ce titre vénéré dans les traditions juive et  chrétienne.

C’est donc au nom de Daniel que fut consacré l’édifice judéo-chrétien (sans doute une synagogue puis une église) que les musulmans transformèrent en mosquée. Le père dominicain et missionnaire Jacques Rhétoré, rapporta dans la narration de ses Voyages à Kirkouk en juin-juillet 1878, que l’édifice demeura chrétien jusqu’au tournant des XVIIe – XVIIIe siècles[2].

Il s’agit d’un édifice mononef à double dôme contient 4 tombes (cénotaphes) : Celle du prophète Daniel, mais aussi celles de ses compagnons Ananias, Azarias et Misaël, connus comme les trois jeunes gens de la Fournaise ardente, passés à la postérité grâce au Livre de Daniel. Vénérés et sanctifiés dans l’orthodoxie chrétienne, ils sont aujourd’hui sujets de dévotion par les pèlerins et visiteurs musulmans.

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[1] L’exploratrice Gertrude Bell la décrivit au cours de ses voyages, in Churches an monasteries of the Tur Abdin, 1913.

[2] Cité par Jean-Maurice Fiey, in Assyrie Chrétienne,  vol.III, p. 53, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1968.

Bâtiments et mosquées (anciennes églises) sur la citadelle de Kirkouk à côté de l’ancienne cathédrale chaldéenne Om al Ahzane.
Juin 2018 © Pascal Maguesyan / MESOPOTAMIA

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