L’église Mar Guorguis de Bartella
L’église syriaque-catholique Mar Guorguis de Bartella se situe à 36°21’06.78 »N 43°22’36.48 »E et 288 mètres d’altitude.
L’ancienne église Mar Guorguis dont on ne connait pas la date de construction a été rénovée au milieu du XIXe siècle. La nouvelle église Mar Guorguis a été construite en 1934. La nouvelle Mar Guorguis a été ravagée et incendiée par Daesh, lors de l’occupation de la ville. Depuis la libération de Bartella, d’importants travaux de rénovation et de réhabilitation ont été entrepris pour rendre à Mar Guorguis son beau cachet et son usage liturgique. La vie paroissiale a été relancée.
Localisation
L’église syriaque-catholique Mar Guorguis de Bartella se situe à 36°21’06.78 »N 43°22’36.48 »E et 288 mètres d’altitude. À l’est du Tigre et l’ouest du Khazir, Bartella est à quelques kilomètres au nord de Karamlesse et de Qaraqosh.
Entre Erbil à 60 km au sud-est et Mossoul à 20 km au nord-ouest, Bartella se trouve au cœur de la plaine des Syriaques.
Le nom du village semble venir de Bét Bar Telli ou Bét Tarlaï, le « village connu sous la montagne », connu dès le VIe – VIIe siècle[1].
[1] In Assyrie chrétienne, vol.II, Jean-Maurice Fiey, L’Institut de lettres orientales de Beyrouth, 1965, p. 417
Fragments d’histoire
Occupé sans doute dès l’Antiquité, Bartella compte un tell archéologique de 9 mètres de hauteur, 42 de long et 34 de large[1], que des historiens considèrent comme contemporain de l’époque d’Alexandre le Grand.
Bartella était un grand village mixte de chrétiens syriaques et de musulmans shabaks de 15000 habitants[2] en 2014 avant l’offensive de Daesh, là où il y en avait « 4266, tous syriens »[3] en 1965, et 900 en 1891[4] dans une proportion de 2/3 orthodoxes et 1/3 catholiques.
Au début du VIIe siècle les chrétiens de Bartella étaient membres de l’Église de l’Orient. Ils passèrent progressivement à l’Église syriaque-orthodoxe sous l’influence des prédicateurs du grand monastère Mar Matta, à seulement 15 km au nord, nord-est. Depuis lors Bartella n’a jamais cesser de donner nombre de maphriens, patriarches et évêques, tant et si bien que la cité est considérée comme la « capitale » syriaque-orthodoxe dans la plaine de Ninive. Cette situation engendra aussi au long des siècles nombre de querelles de gouvernance intestines.
Comme tous les villages chrétiens de la plaine des Syriaques, Bartella eût son lot de pillages, massacres et fléaux. Les troupes de Nadir Shah ravagèrent la localité en 1743. Au cours des années 1756-1758 une tribu bédouine, Albu Hamad, en fit tout autant. En 1789, un nouveau pillage y fut commis par l’émir yézidi, Tšōlō Bek[5]. En 1791, une terrible famine frappa toute la région entre Erbil et Mossoul et sévit également à Bartella.
Plus près de nous les sœurs dominicaines y avaient encore une école en 2014, avant l’invasion de Daesh.
Bartella comprenait au XIIe siècle deux couvents, dont il ne reste presque rien de nos jours. Le premier est le couvent des Quarante Martyrs, où résida notamment le plus célèbre de tous les maphriens Grégoire Abū 1 Farağ Bar Haebraus, maphrien de 1264 à 1286, dont la célèbre Chronologie décrit l’arrivée des Mongols dans la région. Le second est le couvent de Yohannan Ben Nagéré où résidaient encore des moines à la fin du XVIe siècle.
Bartella a compté jusqu’à 6 églises. Les deux premières sont totalement ruinées et disparues. Dans la grande église Mar Ahūdemmeh, aujourd’hui impossible à localiser, se trouva longtemps la cellule maphrianale. Les pierres de l’église Sépna Sédé (Saida el Sédé) ont été réemployées pour construire Mar Guōrguis, objet de cette notice. L’église Mart Mariam attestée dès le XVe siècle a été totalement rénovée en 1890. La nouvelle Mar Guōrguis des Syriaques-Catholiques jouxte l’église syriaque-orthodoxe Mart Schmouni.
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[1] In La Turquie d’Asie, Vital Cuinet, Éd. Ernest Leroux, Paris, 1891, p.830-831 & Assyrie chrétienne, vol.II, L’Institut de lettres orientales de Beyrouth, 1965, p. 417
[2] In Qaraqoche ou la disparition des Chrétiens de la plaine de Ninive, Christian Lochon, directeur honoraire des études au CHEAM, Bulletin de l’Œuvre d’Orient, 2015, p. 138
[3] Id. note 1, p. 416
[4] In La Turquie d’Asie, Vital Cuinet, Éd. Ernest Leroux, Paris, 1891, p.830
[5] Id. p.428
À propos de l’Église syriaque-catholique
C’est à Antioche, en l’an 38 que nait l’Église et que les apôtres du Christ reçoivent pour la première fois le nom de chrétiens. Antioche est alors la capitale de la province de Syrie de l’Empire Romain. Les chrétiens de cette province romaine, qui s’étend de la Méditerranée à la Perse vont être appelés « syriaques » ou « syriens ». Antioche devient un lieu central du christianisme dans la Syrie Romaine et au Moyen-Orient, abritant une des trois écoles théologiques de la chrétienté les autres se trouvant à Alexandrie et Constantinople.
Toute cette province romaine était plutôt de langue et de culture grecque. Ses fondements théologiques reposaient essentiellement sur la philosophie d’Aristote, alors qu’Alexandrie avait plutôt développé le courant platonicien.
Au Ve siècle, l’Église recherche ses fondements théologiques et les écoles d’Alexandrie, Constantinople et Antioche fournissent aux responsables de l’Église matière à réflexion.
En 451, eût lieu le concile de Chalcédoine. Le précédent concile, à Éphèse, en 431 condamna le patriarche de Constantinople, Nestorius, qui défendit la doctrine des deux natures (hypostases) du Christ : l’une divine, l’autre humaine. Le nestorianisme distinguait en Jésus deux personnes, d’une part fils de Dieu et d’autre part fils de Marie qui ne pouvait être Mère de Dieu (Théotokos). Jugé hérétique, Nestorius fut banni de l’Église et fut contraint de s’exiler.
À Chalcédoine, une nouvelle controverse christologique fut mise en discussion. Les Églises syriaque, d’Egypte, d’Ethiopie et d’Arménie y furent accusées de soutenir la théorie monophysite : la nature divine du Christ a absorbé sa nature humaine. Le Christ n’a qu’une seule nature et elle est divine. Après études et débats, l’Église proclama l’unité de la personne du Christ et ces 4 Églises considérées comme schismatiques devinrent autocéphales.
Les Syriaques furent ensuite violemment persécutés par l’empereur byzantin qui voyait dans le monophysisme un refus de son autorité. En 533, il ne restait plus que 3 évêques syriaques dans cette Église.
Au VIe sciècle, Yaacoub Al-Bardaï (Jacques Baradée), moine syriaque, réorganisa l’Église syriaque. Après son ordination épiscopale, il entreprit un grand voyage dans toutes les régions syriaques pour ordonner des évêques, des prêtres et des diacres. Il ordonna 2 patriarches, 127 évêques et 100 000 clercs. C’est en son honneur qu’on appellera l’Église Syriaque, l’Eglise « Jacobite ».
Cette Église (orthodoxe) connut un schisme au XVIIIe siècle, en 1783, qui donna naissance à l’Église syriaque-catholique rattachée à Rome.
Histoire de l’église Mar Guorguis de Bartella
L’ancienne église Mar Guorguis dont on ne connait pas la date de construction a été rénovée au milieu du XIXe siècle. Elle fut attribuée à l’église syriaque-catholique lors du partage des lieux de culte entre orthodoxes et catholiques.
Mgr Ephrem Barsaume, ancien patriarche syriaque-orthodoxe, rapporta l’existence en 1701 à Bartella d’un couvent au nom de Mar Guorguis. L’ancienne église Mar Guorguis devait sans doute appartenir au domaine conventuel.[1]
La nouvelle église Mar Guorguis a été construite en 1934, avec les pierres restantes des ruines de l’église Sépna Sédé (Saida el Sédé). Ce même réemploi est également invoqué pour la construction de l’église syriaque-orthodoxe Mart Mariam de Bartella (voir la notice correspondante).
L’importance de l’église-couvent Mar Guorguis de Bartella est incontestable. Elle disposait en effet d’une importante bibliothèque de manuscrits « presque tous liturgiques, datant pour la plupart du XIXe siècle.[2] »
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[1] In Assyrie Chrétienne, vol.II. Beyrouth, 1965, p. 429
[2] In Assyrie Chrétienne, vol.II. Beyrouth, 1965, p. 437
Description de l’église Mar Guorguis de Bartella
L’ancienne église Mar Guorguis est ouverte sur une cour au nord qui est dotée d’un martyrion sur son côté est[1] et qui porte la date de 1850 (date de la rénovation).
Une unique porte permet de pénétrer dans cet édifice de type basilical à trois nefs, dont les piliers d’origine ont été renforcés par une armature massive, carrée, en ciment armé. Le chevet est fermé par une porte sainte, enrichie de bas-reliefs ornementaux, ouverte au centre et sur les bas-côtés. Les portes d’accès sont relativement basses. Elles semblent préserver le charme du sanctuaire et l’intimité de la prière eucharistique des célébrants.
Le chœur préserve encore un archaïque maître-autel en pierre à degré placé contre l’abside.
La nouvelle église Mar Guorguis, proche de l’ancienne, présente la même structure fondamentale, à trois nefs. Elle est cependant très différente. Elle est dotée de deux tours élancées en façade, dans un style jusque-là inconnu. Elle est également dotée d’un clocher dont la coiffe polygonale semble être de style arménien.
Équipée d’une entrée latérale, au nord, et d’une grande entrée en façade, à l’ouest, la nouvelle église Mar Guorguis a été ravagée et incendiée par Daesh, lors de l’occupation de la ville. Les traces de ce terrible sinistre étaient encore visibles lors de la visite effectuée en Juin 2017.
L’ancienne église Mar Guorguis a été heureusement épargnée. Presque miraculeusement clament certains habitants !
La bibliothèque du domaine ainsi que le joli musée qui avait été aménagé ont été complètement saccagés par les profanateurs islamistes.
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[1] In Assyrie Chrétienne, vol.II. Beyrouth, 1965, p. 429
Actualité de l’église Mar Guorguis
Depuis la libération de Bartella, d’importants travaux de rénovation et de réhabilitation ont été entrepris pour rendre à Mar Guorguis son beau cachet et son usage liturgique.
La vie paroissiale a été relancée. Noël y a été célébré en 2017.
Une crèche a été installée à cette occasion dans la cour de l’édifice.
Les messes et offices y sont à nouveau célébrés.
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