Le monastère de Mar Matta
Le monastère de Mar Matta se situe à 36°29’24.06″N 43°26’34.01″E et 817 mètres d’altitude sur le mont Maqlūb au nord de la province de Ninive, à 38 km au nord-est de Mossoul.
La tradition rapporte que Matta était originaire de la région de Diyabakır, dans le sud-est de l’actuelle Turquie, et plus précisément du village d’Abkarchat.
Le monastère abrita des milliers de moines dès la fin du IVe siècle.
Monastère de Mar Matta. Plan édité en 1852 © G.P.Badger, extrait de « The Nestorians and their rituals », London, Joseph Masters
Localisation
Le couvent de Mar Matta se situe à 36°29’24.06″N 43°26’34.01″E et 817 mètres d’altitude sur le mont Maqlūb (autrement nommé le mont Alfaf) au nord de la province de Ninive, à 38 km au nord-est de Mossoul.
Posé sur le replat d’un piton rocheux, ce monastère syriaque-orthodoxe offre une double perception exceptionnelle. Vu de la vallée, il apparaît comme suspendu entre terre et ciel et semble appeler le spectateur à la méditation. Inversement, depuis sa terrasse, il livre un horizon à 180° et semble veiller sur le monde d’en-bas, celui des hommes de Ninive et de l’agitation perpétuelle.
Nous sommes ici incontestablement au cœur de l’une des plus belles régions de l’antique Assyrie chrétienne. Ce monastère syriaque-orthodoxe (jacobite) dont on dit qu’il est le plus grand de la Mésopotamie rivalise en puissance et en majesté avec certains des plus grands monastères syriaques-orthodoxes du Tur Abdin, la montagne des Serviteurs de Dieu, dans l’extrême sud-est de l’actuelle Turquie.
La légende dorée
La légende dorée – la tradition – rapporte que Matta (Matthieu) était originaire de la région de Diyabakır – Amid, en syriaque- dans le sud-est de l’actuelle Turquie, et plus précisément du village d’Abkarchat. Il aurait été moine avant de devoir fuir les persécutions de l’empereur romain Julien, dit l’Apostat, en raison de sa tentative d’abolir le christianisme moins de 50 ans après la conversion de son oncle Constantin Ier. Coïncidence, c’est l’année même de la mort de Julien, en 363, à l’issue de la bataille de Ctésiphon contre les Perses sassanides, qu’aurait été fondé le monastère.
L’hagiographie de Mar Matta est intimement associée au baptême et au martyre de Behnām et Sarāh ainsi qu’à la conversion de leur père repentant, Sennachérib, roi de Nimrūd (voir à ce propos la notice sur le monastère Mar Behnām). Une tradition dit du monastère qu’il fut édifié par Sennachérib sur le mont Maqlūb, à la demande expresse de Matta. Une autre tradition attribue sa fondation à l’initiative de la reine Širīn.
Le scénario de la vie de Matta de Diyarbakır tel qu’il est transmis par la tradition souffrirait de critiques en « véracité historique », que souligne l’orientaliste Jean-Maurice Fiey dans son œuvre Assyrie Chrétienne. Développant sa propre argumentation scientifique, il cite également les réserves du patriarche syrien-orthodoxe d’Antioche et de tout l’Orient, S.S. Mgr Ignace Ya’qub III. L’orientaliste dominicain souligne en revanche un point de convergence œcuménique : « Au fond, les Nestoriens s’entendent avec les Jacobites : le couvent fut fondé, par un anachorète « grec », au IVe siècle, ou au plus tard au début du Ve siècle. »
Fragments d’histoire
Passé relativement tôt sous juridiction syriaque orthodoxe, il est dit du monastère qu’il abrita des milliers de moines dès la fin du IVe siècle. Il se pourrait en fait qu’une telle assertion s’appliquât à la totalité du Mont Maqlūb, surnommé la « Montagne des Milliers », ce qui en dit tout de même long sur le rayonnement de l’église syriaque-orthodoxe et le monastère de Mār Matta dans le nord de Mésopotamie et au-delà. Lieu de résidence du Maphrien de l’Orient après son départ de Tikrit (Maphrien est le titre donné au primat de l’Église syriaque-orthodoxe de Mésopotamie. Le Maphrianat de l’Orient a cessé en 1859), le monastère eût également des liens étroits avec l’Église syro-malankare en Inde.
Régulièrement assailli par les Kurdes, notamment aux XIIe et XIVe siècles, le couvent n’en constitua pas moins un lieu de résistance autant qu’un refuge pour les populations locales et régionales chrétiennes persécutées. Ainsi, le patriarche de l’Église de l’Orient Simon XXII Paul y trouva le secours et le repos en 1918, après le génocide assyro-chaldéen dans l’Empire ottoman, tandis que les 60 000 Assyriens de sa communauté d’Ourmia (en Perse) furent contraints à un terrible exode vers la Mésopotamie.
Un monastère, plusieurs églises
Plusieurs églises (la principale est consacrée à Mar Matta), chapelles votives et mémoriaux composent l’ensemble monastique, auquel s’ajoutent nombre de grottes d’anachorètes percées dans la montagne, vibrant témoignage d’une foi primitive aujourd’hui évanouie, mais qui survécut avec abnégation aux plus terribles exactions.
Actualité
La dernière offensive, celle de Daesh en 2014, fut stoppée dans la vallée à quelques kilomètres seulement du monastère, cependant que les villages en contrebas furent évacués et leurs occupants transportés temporairement à Mar Matta.
Face à ces nouveaux périls sur les hommes et le patrimoine, les collections de la bibliothèque du couvent de Mar Matta ont été numérisées avec le concours de L’Œuvre d’Orient.
Le couvent de Mar Matta n’est plus que l’ombre de sa magnificence, la petite communauté monastique qui demeure sur le site veille aujourd’hui sur un patrimoine immémorial que les villageois alentours et les nombreux pèlerins fréquentent toujours avec ferveur.
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